Bus 22

25 mars 2008 : les usagers et riverains du bus 22 qui relie Bègles à Bordeaux découvrent que le tracé de

leur ligne a été modifié. Elle emprunte désormais la rue de Bègles et ne dessert plus le boulevard Albert 1er, la barrière de Toulouse, les Cours de la Somme et de l’Yser. Consternation. Colère. Très vite, usagers et riverains de la ligne se mobilisent. La protestation, à laquelle C.A.U.D.E.R.E.S participe activement,

prend une ampleur inattendue, dont les médias se font l’écho et que symbolise une pétition réunissant plus de 5000 signatures. 12 juillet 2008 : le bus est revenu ! On dira : tout est bien qui finit bien. Sans doute. Et cependant, à y regarder de près, cette histoire du 22 ne témoigne malheureusement pas d’un

succès de cette démocratie locale vivante, participative, à l’écoute des citoyens, que nous appelons de nos voeux. Elle rapporte plutôt la preuve que, contrairement aux belles déclarations des uns et des autres rien ne change vraiment sur les bords de la Garonne et que, en l’absence de toute vraie concertation, les citoyens ne peuvent espérer se faire entendre, un peu, de leurs élus qu’en leur parlant très, très, très fort…C’est à la C.U.B., dans le cadre du rapport relatif à la restructuration du réseau de transport

en commun à l’heure de la mise en place de la seconde phase du tramway (c’est-à-dire son arrivée à Bègles) que le sort du 22 fut scellé, à l’unanimité des votants, le 30 mars 2007. Ce jour- là, on aurait été bien en peine de trouver sur l’agglomération un seul citoyen, voire une seul usager, dans la «confidence».

Il est vrai que, cette fois, nos élus n’avaient pas même pris soin d’engager l’une de ces concertations en trompe-l’oeil dont ils ont le secret. Sans doute était-ce plus prudent. Car le citoyen ordinaire aurait eu un peu de mal à établir immédiatement un lien entre l’arrivée du tramway à Bègles et la disparition de son bus dans des rues situées à deux, voire trois kilomètres de là… Le même citoyen aurait pu s’étonner de

constater que la décision de modifier le tracé du 22 se trouvait complètement noyée dans un ensemble plus que copieux comprenant des dizaines de décisions créant, modifiant ou supprimant des lignes de bus ou de tramway… Il y a dans ces drôles de « paquets » que les assemblées (jusqu’à l’Assemblée Nationale) affectionnent une forme d’aberration logique et de permanent chantage au « tout ou rien » exercé  sur nos élus. Car comment « bien » voter dans ces conditions ? Comment répondre d’un seul

« oui » ou d’un seul « non » à des dizaines de propositions, artificiellement réunies en une seule ?

Quoi qu’il en soit, c’est à l’unanimité que nos élus approuvèrent les propositions qui leur étaient faites. Cette unanimité n’étonnera pas ceux que plus rien n’étonne ni ne heurte en politique. Les autres – dont nous sommes – pourront tout de même s’interroger : mais comment fonctionne-t-elle donc cette  assemblée élue pour aller ainsi, de vote en vote, et d’unanimité en unanimité ? La démocratie locale

consiste-t-elle en l’absence de toute forme d’opposition ? Ne devrait-elle pas plutôt consister en la confrontation pacifique de points de vue différents, voire contraires, mais tous légitimes ? Nos « élus de quartier » représentent-ils vraiment leurs quartiers et ceux qui les ont élus ou ne sont ils plus en réalité que les éléments d’ensembles plus vastes et plus politisés, qui les dépassent et les bâillonnent ? Questions de fond. Alain Moga, conseiller municipal UMP de Bordeaux et aujourd’hui élu à la C.U.B.,

reconnaît donc honnêtement que s’il n’avait pas, quant à lui, voté la suppression du 22, c’est tout

simplement qu’il avait eu la « chance » de ne pas être encore conseiller à la C.U.B le jour du vote.

Nous avons donc gagné. Et nous nous en étonnerions presque… Quand, dans une démocratie, nous devrions considérer cette petite (pas si petite) victoire – le retour du 22, voulu par le plus grand nombre – comme la chose la plus naturelle du monde… Mais trêve de réflexions et à l’heure du succès, venons-en

plutôt aux remerciements d’usage. Merci donc à Madame Michelle Gonthier, septuagénaire enjouée et initiatrice – mais c’était sans le savoir – de tout notre mouvement. Sans elle en effet, sans cette pétition dont elle eut la première l’idée quand nul ou presque ne parlait encore de la prochaine disparition du 22, sans cette formidable envie qui fut la sienne, pour une fois, de ne pas « laisser faire », rien, peut-être

ne serait arrivé. Merci aussi à Guillaume Tallec, patron du « Bistroquet » sur le cours de l’Yser, dont la

colère sut si tôt et si bien se muer en un activisme enthousiaste et utile qu’il apparut très vite comme celui qui devait devenir, sinon le « leader », du moins l’incarnation de notre mouvement. Pas militants ni politiques pour deux sous, Michelle Gonthier et Guillaume Tallec nous auront donné à tous la preuve simple – la preuve par l’exemple – qu’un citoyen ou une citoyenne ordinaire peut, en s’engageant

ponctuellement mais résolument dans la vie de sa cité, faire subir aux égoïsmes et au fatalisme ambiants, sinon une défaite définitive du moins, un vrai petit recul. Merci encore à tous les commerçants de la barrière de Toulouse, du boulevard Albert 1er  et du début du Cours de la Somme qui ont soutenu et relayé notre pétition.  Merci enfin à toutes celles et à tous ceux bien sûr (5433 personnes précisément) qui nous

ont donné leur signature. Il n’est pas douteux que cette pétition, dont l’ampleur nous a surpris nous-êmes, aura pesé de tout son poids sur le succès final.

Vive la démocratie locale !

 

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